Que devons-nous sacrifier ?
La Fête du Sacrifice est un héritage que nous a légué le Prophète Ibrahim A.S. en sacrifiant son fils Ismaël A.S., qui lui aussi accepta de bon gré que son âme soit sacrifiée sur le sentier de Dieu. À l’occasion de cet évènement, Dieu a inoubliablement ancré dans nos cœurs la résignation, l’obéissance et la sincérité de ces deux grands Prophètes .
En ce sens, la Fête du Sacrifice est l’aboutissement d’un long processus, la célébration de la victoire d’âpres épreuves dignement surmontées. Le Seigneur Tout-Puissant n’a pas permis que les noms des serviteurs sincères et inconditionnellement dévoués à Lui soient oubliés. C’est pour cette raison que, pour avoir fait le plus grand sacrifice au nom de l’Islam, le nom béni du Bien-Aimé Prophète (pbsl) est récité durant l’adhan et prononcé conjointement avec Celui d’Allah le Tout-Puissant dans la profession de foi.
Voici les noms de certains Prophètes et serviteurs hautement pieux qu’Allah le Tout-Puissant nous cite dans le Saint Coran en raison de leur dévotion indéfectible et inégalable envers Lui :
“ Mentionne, dans le Livre (le Coran), Marie, quand elle se retira de sa famille en un lieu vers l’Orient ! ”[1]
“ Et mentionne dans le Livre, Abraham ! C’était un très véridique et un Prophète ! ”[2]
“ Et mentionne dans le Livre Moïse ! C’était vraiment un élu, et c’était un messager et un Prophète. ”[3]
“ Et mentionne Idris, dans le Livre ! C’était un véridique et un Prophète. ”[4]
Dieu L’Exalté a fait vivre dans les cœurs les noms de grands pieux qui ont emboité le pas aux Prophètes en perpétrant la prédication du message divin, la loyauté et le service dans le sentier divin.
Le monde a vu naitre assez de grands hommes puissants et fortunés dont les noms furent oubliés, tandis que ceux des distingués croyants pieux continuent d’animer les cœurs.
Telle est la leçon que nous devons en tirer :
Si nous voulons dûment comprendre le sens de la Fête du Sacrifice, nous devons d’abord Lui manifester la loyauté qu’Il attend de nous.
Dans le cas contraire, le sacrifice que nous ferons n’ira pas au-delà d’une simple tradition religieuse et sociale.
Ecoutons de la part des soufis certains de nos biens précieux que nous devons sacrifier avant même le sacrifice de la fête, pour que notre fête soit vraiment une fête :
Le sacrifice des biens :
L’homme est à même de dépenser facilement tous ses biens pour sa propre personne ou pour un membre de sa famille mais quand il s’agit de le faire pour un autre il en dépense au proportionnellement à l’amour qu’il éprouve pour lui et enfin lorsque c’est le cas d’une personne qui lui est étrangère, il ne dépense pas ou peu.
Le noble compagnon Aboubakr r.a., qui fut le plus grand exemple en termes de générosité après les Prophètes, sacrifia tous ses biens pour Allah et Son messager r.
Omar r.a., en revanche, fit don de la moitié de sa richesse.
Le Prophète (pbsl) n’accepta pas un tel sacrifice de la part d’un autre compagnon ; pour les autres, il a établi un plafond à savoir les 1/3 de leur richesse et pas plus.
N’abordons même pas le sujet de se rapprocher des compagnons ; nous, faibles musulmans, si nous parvenons à donner les 1/40 de nos biens comme zakat, nous serons par défaut classés parmi les serviteurs pieux.
Et pourtant bien que le taux de la Zakat soit minime et prélevée sur l’excédent des biens qu’on s’en acquitte un an après peu de Musulmans la donnent de bon gré.
L’imam Rabbani g décrit ainsi la situation de tels serviteurs :
“ Notre sujet ne concerne pas la prétendue foi d’une personne qui ne peut délaisser le monde même par défaut (en donnant la zakat et suivant les règles de la charia). Sa prétendue foi ne lui sera en effet d’aucune utilité au Jour Dernier.”[5]
Le sacrifice de l’âme :
Tout comme il est difficile de dépenser de ses biens dans le sentier de Dieu, il est encore plus difficile de Lui sacrifier son âme. Aller au front pour la religion et la patrie chaque fois que cela est nécessaire n’est pas l’apanage de tout homme.
C’est pour cela que ceux qui sacrifient leur vie en allant au front n’ont pas les mêmes récompenses que ceux qui sacrifient leurs biens. C’est ainsi que celui qui fait don du pain d’orge dans ce monde aura du pain de blé dans l’autre monde. Quant à celui qui sacrifie sa vie pour Dieu, il sera rétribué par la vie éternelle.
Pendant que le premier reçoit sa récompense de derrière la porte, le second, quant à lui, se voit offrir des grâces spéciales dans la propriété privée du Sultan sans même attendre le jugement apocalyptique.
Ce verset coranique nous l’indique :
“ Ne pense pas que ceux qui ont été tués dans le sentier d’Allah, soient morts. Au contraire, ils sont vivants, auprès de leur Seigneur, bien pourvus.”[6]
Le Saint Mawlânâ rh.a. exprime ainsi le privilège de ceux qui sacrifient leur vie dans le sentier divin :
“Cela surtout pour le prodigue qui a librement dépensé sa vie et offert sa gorge en sacrifice au Créateur.
Il offre sa gorge comme Ismaël A.S. : le couteau ne peut rien faire contre elle.
Pour cette raison donc les martyrs vivent dans la joie, ne regarde pas comme les infidèles le corps seul.
Puisque Dieu leur a donné en retour l’esprit de l’éternité- un esprit libre de chagrin, de peine, de souffrance.”[7]
Selon Mawlânâ ç on ne peut pas sacrifier son âme dans le sentier divin uniquement en allant au front. Celui qui ne se soumet pas aux tentations de son âme et s’efforce sans cesse de la dompter, la sacrifie progressivement pour Dieu. À chaque heure de la prière, de tels serviteurs étranglent leurs âmes en présence de leur Seigneur tel que métaphorisé plus-bas :
– Ô imam ! Tel est le sens de la formule “Allahou Akbar” que tu prononces en début de prière : “Ô Allah ! Nous sacrifions notre âme en Ta présence.
– Lorsque tu égorges ta bête du sacrifice, tu prononces cette formule ; en effet, c’est cette même formule qui est récitée quand tu sacrifies ton âme.
Par conséquent, ceux qui accomplissent dûment les prières sont ceux qui fondent leur volonté dans la volonté du Seigneur.
À ce stade, il est très important de ne pas oublier une chose à savoir l’expression métaphorique “tuer son âme” dans le langage des soufis.
En effet, tuer l’âme signifie ne pas satisfaire ses désirs et envies vicieux alors que tuer physiquement une âme est un meurtre, tout comme se tuer soi-même est un suicide.
Dans ces deux derniers cas, il s’agit de crimes graves qui mènent l’homme en enfer.
Le sacrifice de l’esprit :
Selon les soufis, l’esprit demeure une autre entité que le croyant doit sacrifier au Créateur. Car, l’esprit qui n’est pas éduqué à la lumière de la révélation divine, peut devenir un ennemi féroce de la religion, s’il coopère avec l’âme.
Malheureusement de nos jours nous entendons souvent des propos tels que ceux cités ci-dessous et qui tout en usant de la raison révèlent un signe de rébellion contre Dieu. “Selon moi, un tel verset ne devrait pas figurer dans le Saint Coran, mon Seigneur ne peut révéler de telles choses.”
Allah le Tout-Puissant avertit ces gens à l’esprit pervers :
“ Ô homme ! Qu’est-ce qui t’a trompé au sujet de ton Seigneur, le Noble.”[8]
Tel que Mawlânâ rh.a. l’a mentionné, Canaan occupe la première place parmi ceux qui se sont trompés au sujet de leur Créateur :
« Sacrifie ta compréhension en présence de Mustafa et dis “Hasbiya Allah” car Dieu me suffit ! Ne retire pas la tête de l’arche comme Canaan que son âme intelligente trompa. Disant : “ Je vais me rendre au sommet de cette haute montagne ; pourquoi serais-je reconnaissant à l’égard de Noé ?”[9]
Selon Mawlânâ ç, celui qui ne sacrifie pas son âme, ses biens et son esprit sur le sentier divin au nom de l’amour de Dieu, ne pourra aucunement accéder à la perfection spirituelle.
Il qualifie de telles personnes d’être “victimes de leurs subsistance et passions à l’apparence humaine.
Ce sont des créatures sans âme qui adorent le matériel :
“Lorsqu’il y a de l’eau dans le canal, alors seulement c’est un canal. L’homme (véritable) est celui qui possède l’esprit.
Ces autres ne sont pas des hommes, ce sont de simples formes, ils se meurent d’appétit pour du pain et sont tués par leur désir.”[10]
Toujours selon Mawlânâ ç, le Saint Coran est dignement compris par ceux qui sacrifient dans le sentier de Dieu leur esprit et non pas ceux qui l’adorent :
“Ne demande la signification du Coran qu’au Coran et à celui qui a consumé sa vaine imagination. Et ce qui est devenu un sacrifice au Coran, et s’est abaissé, de sorte que le Coran est devenu l’essence de son esprit.”[11]
Apprends le sens du Coran du serviteur qui a dompté son égo, s’est soumis et a égorgé son âme pour le Coran !
Notre Omnipotent Seigneur nous cite en exemple le Prophète Ibrahim A.S. qui accéda aux hautes dimensions au sujet du sacrifice de certaines entités que nous avons déjà partiellement énumérées, et fit de lui Son ami intime. Après lui, le Noble Prophète Muhammad (pbsl) fit ces sacrifices de la meilleure façon.
Alors nous aussi, suivons le chemin de notre aïeul Ibrahim A.S. et du Prophète Muhammad (pbsl) en sacrifiant sur le sentier de Dieu nos âmes, biens et esprit. Procédons ainsi pour accéder au sens spirituel du sacrifice !
Que Dieu fasse que tous nos lecteurs soient au nombre de ceux qui célèbrent dûment la Fête du Sacrifice !
[1]. Sourate Mariam (19), verset 16.
[2]. Sourate Mariam (19), verset 41.
[3]. Sourate Mariam (19), verset 51.
[4]. Sourate Mariam (19), verset 56.
[5]. 72. Mektup.
[6]. Sourate Al-’Imrân (3), verset 169.
[7]. Mathnawi, II, 381 à 383 Trad. Eva de Vitray Meyerowitch et Djamchid Mortazavi Ed. Municipalité de Konya.
[8]. Sourate al-Infitar (82), verset 6.
[9]. Mathnawi, IV, 1408-1410, Traduction Eva de Vitray Meyerowitch et Djamchid Mortazavi.
[10]. Mathnawi V, 2885-2886, Traduction Eva de Vitray Meyerowitch et Djamchid Mortazavi.
[11]. Mathnawi V, 3128-3129 Traduction Eva de Vitray Meyerowitch et Djamchid Mortazavi.
Salam aleykoum à l’auteur de cette belle œuvre. Qu’Allah vous en récompense.Elle m’a servi et j’espère qu’elle servira à tant d’autres personnes. Toutefois je n’arrive pas à comprendre le sens des lettres r, y, ç, t placées après les sublimes noms mentionnés dans cet article.
merci pour votre commentaire et remarque. Le nécessaire a été fait !