Le Pèlerinage et le Sacrifice : Une Ecole de Soumission
L’essence de l’Islam, c’est de manifester une soumission totale et inconditionnée à Allah et à tout ordre provenant de Lui. C’est d’avoir une confiance entière au Seigneur de l’univers, Connaisseur parfait du visible et l’invisible, du passé, du présent, du futur et de toute chose.
La foi est synonyme d’ancrer une telle confiance dans le cœur et de professer cette réalité.
L’Islam signifie donc mener son existence selon les normes divines, en manifestant une soumission basée sur cette confiance. Et la dévotion qui permettra au serviteur d’accéder au salut ici-bas et dans l’au-delà est celle de la personnalité religieuse fondée sur les piliers d’une telle soumission.
Cette réalité est mentionnée dans plusieurs versets coraniques.
Par exemple, lorsque les juifs affirmèrent que l’accession au salut ne peut être possible qu’en étant juif, et que les chrétiens avancèrent aussi les mêmes propos concernant les membres de leur communauté, ce verset coranique fut révélé :
“ Et ils ont dit : “Nul n’entrera au Paradis que Juifs ou Chrétiens”. Voilà leurs chimères. – Dis : “Donnez votre preuve, si vous êtes véridiques”. Non, mais quiconque soumet à Allah son être tout en faisant le bien, aura sa rétribution auprès de son Seigneur. Pour eux, nulle crainte, et ils ne seront point attristés. ”[1]
Dans un autre verset, la plupart des mêmes expressions sont utilisées comme un message universel pour démontrer que la soumission à Dieu est le moyen le plus sûr et certain pour accéder au salut :
“ Et quiconque soumet son être à Allah, tout en étant bienfaisant, s’accroche réellement à l’anse la plus ferme. La fin de toute chose appartient à Allah. ”[2]
La soumission à Dieu signifie ne pas avoir de doute à propos des informations qu’Il a révélées, dompter tout désir exhortant à la désobéissance des ordres divins, s’éloigner de toute intention incompatible à la sincérité religieuse et ne pas s’opposer à la volonté divine et aux sentences de la charia.
En fait, la soumission est le contraire de tout ce qui entre dans le cadre de l’objection et de la rébellion à l’encontre du Seigneur.
Dans le Saint Coran, le concept de soumission est généralement utilisé pour signifier l’abandon sincère et volontaire d’une personne à la volonté divine.
De ce point de vue, on peut donc avancer que le musulman est celui qui s’abandonne pleinement à Allah et à tout ce qui provient de Lui. S’abandonner à Dieu, c’est donc s’affranchir de l’esclavage de tout ce qui éloigne de Lui. Et c’est cela la vraie servitude envers Le Créateur telle que décrite dans le Noble Coran.
En tant que caractéristique d’une servitude absolue, la soumission est le stade d’un cœur et d’une vie agréés, et tous les Prophètes implorèrent Allah pour y accéder. Dans le Livre Saint, les Prophètes qui sont les plus mentionnés à ce sujet sont Ibrahim u et son fils adoré Ismaël u qui implorèrent ainsi leur Seigneur en élevant les fondations de la Kaaba :
“ Notre Seigneur ! Fais de nous Tes Soumis, et de notre descendance une communauté soumise à Toi. Et montre-nous nos rites et accepte de nous le repentir. Car c’est Toi certes l’Accueillant au repentir, le Miséricordieux. ”[3]
Les noms bénis d’Ibrahim et d’Ismaël sont abondamment évoqués dans divers versets coraniques car ils furent un très bel exemple de soumission absolue à chaque étape de leur vie. Leur histoire est présentée à tous les croyants comme une base fondamentale et surtout à l’occasion du pèlerinage et de la Fête du Sacrifice.
À cet égard, on peut donc affirmer que le pèlerinage et le sacrifice sont comme une école spécialisée dans l’enseignement de la soumission pour les serviteurs honorés par la foi islamique.
D’ailleurs, lorsque nous analysons de près les conditions, principes et modes d’accomplissement du pèlerinage, nous remarquons que c’est un enseignement de totale soumission.
Par exemple, le stationnement temporaire sur le mont Arafat est apparemment un ordre divin dont on ne peut comprendre aisément la sagesse. Pourtant, si le pèlerin ne s’acquitte pas de ce stationnement, son pèlerinage n’est point valable.
Il en est de même pour la circumambulation qui consiste à tourner autour d’une demeure formée de quatre murs, à savoir la Kaaba, Beytullâh.
C’est aussi le cas pour les allers-retours entre les deux collines Safa et Maroua.
Il en est de même pour la lapidation du Diable, à l’aide de petits cailloux, qui se fait sur trois pierres symboliquement déterminées.
Bien évidemment, même si tous ces rites comportent diverses sagesses divines, nous pouvons aisément admettre que l’un de ses buts fondamentaux, c’est d’enjoindre les serviteurs à la soumission.
Lors du pèlerinage, le serviteur qui se soumet pleinement à ces ordres “Arrête-toi là ! ”, “Dirige-toi là-bas ! ”, “Repose-toi ici ! ”, “Retourne là-bas ! ” et “Lance des cailloux ici ! ”, prend conscience qu’il doit obéir à toutes les recommandations divines, même s’il ignore la sagesse qu’elles comportent. Telle est la soumission, c’est-à-dire l’abandon à Allah et à tout ordre émanant de Lui, et non à notre esprit et propre instinct.
Tel que l’exprime Necip Fazil, il s’agit de prendre conscience de cette réalité :
Ne considère pas tes yeux, ton esprit et tes idées,
Néglige-les tous !
Avec Son ordre, ce qui te parait comme un désert,
Te sera comme un lac.
Méditer constamment pour comprendre la sagesse enfouie derrière les recommandations divines relève d’une grande adoration.
Le pèlerinage est en ce sens un acte d’adoration au cours duquel le serviteur plonge dans un exercice de contemplation et de méditation profonde.
Pour en revenir au sujet de la servitude totale que nous avons abordé plus-haut, il est question de se résigner aux injonctions divines juste parce qu’elles proviennent de Dieu, sans se demander pourquoi ceci ou cela, sans sombrer dans le doute, l’hésitation, la paresse, l’insouciance et la négligence.
Et quand on parle de pèlerinage, il s’agit d’un acte d’adoration qui éduque les serviteurs et qui les pousse à la perception et à la prise de conscience de leur servitude.
Le rappel de l’histoire d’Ibrahim u et de sa famille, à presque toutes les étapes du pèlerinage en tant qu’excellent modèle de soumission, est un élément capital pour la construction d’une communauté soumise à Dieu. Ce fut une famille dont tous les membres à savoir le père (Ibrahim u), la mère et le fils sacrifièrent leurs âme et biens, au point de mériter le titre de meilleur exemple de dévotion à L’Auguste Créateur. À travers leur servitude, ils furent un symbole de résignation absolue au Seigneur pour toute l’humanité jusqu’à la fin des temps. Ainsi, le sacrifice de la bête est-il une adoration qui enseigne au serviteur la nécessité de sacrifier sa propre âme pour Dieu si cela s’avère nécessaire. C’est de pouvoir dire ceci :
Le Propriétaire de l’âme l’a demandée,
Est-il donc possible de ne pas la Lui rendre ?
Sacrifions-la donc car, elle n’est ni mienne ni tienne !
L’adoration du pèlerinage et du sacrifice étant toutes deux effectuées au cours de la même période, constituent deux formations distinctes de l’école divine. Ce sont deux programmes très particuliers mis en application dans un camp divin. L’abandon absolu au Seigneur est le fruit d’une éducation qui imprègne les profondeurs de la conscience humaine. À cet égard, le pèlerinage et le sacrifice sont des actes d’adoration dont les serviteurs qui en ont les moyens doivent nécessairement s’acquitter. Car le plus grand souci et combat du serviteur, c’est de pouvoir retourner à son Créateur en état de pleine soumission. Tel est le résultat fondamental que Le Seigneur attend de chacun de Ses serviteurs. D’ailleurs, cette attente divine est ainsi exprimée dans le Glorieux Coran :
“ Ô les croyants ! Craignez Allah comme Il doit être craint. Et ne mourez qu’en pleine soumission. ”[4]
[1]. Sourate al-Bakara (2), versets 111-112.
[2]. Sourate al-Luqman (31), verset 22.
[3]. Sourate al-Bakara (2), verset 128.
[4]. Sourate Al-i Imrân (3), verset 102.